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Making of et logiciels du film Avatar

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James Cameron l’a fait ! Douze ans après Titanic, il renouvelle l’exploit de nous plonger dans une histoire palpitante dans laquelle les effets spéciaux, stupéfiants, ne prennent jamais le pas sur les personnages. Un émerveillement visuel (voir le Motion design sur Pandora), mais aussi un film de SF qui prend parti. Anatomie d’un monument du Septième Art.

Making of et logiciels du film Avatar

RÉ-VO-LU-TION-NAI-RE ! Puisqu’on vous le dit… Avatarest une étape dans l’histoire du cinéma, à la fois par la manière dont il a été réalisé, et par le réalisme bluffant du résultat à l’écran. Sur les 160 minutes que dure le film, 117 minutes sont de pures créations infographiques : le décor, la végétation, les accessoires, les personnages, tout est créé par ordinateur, rien n’a été filmé. Et la vraie performance, c’est qu’on ne sent pas de transition palpable entre les images réelles qui mettent en scène les acteurs à bord des vaisseaux, et les images virtuelles qui prolongent l’action sur la planète Pandora. Lorsque la mise en scène bascule sur les personnages virtuels, on ne sent pas de différence notable, on ne se retrouve ni dans Le Pôle Express, ni dans Final Fantasy. Dans Avatar, les images infographiques atteignent un réalisme jamais vu dans le genre. Une fois encore, James Cameron a repoussé les limites de la technologie vers de nouvelles frontières. Comme il l’avait déjà fait par le passé avecAbyssTerminator 2 ou Titanic.

Les coulisses du film Avatar

Il faut dire aussi qu’il s’est donné le temps et les moyens de remporter ce nouveau pari. Les origines d’Avatar remontent à… 1976. Alors qu’il n’était qu’un modeste étudiant, Cameron avait déjà imaginé certains éléments qui se retrouveront dans le scénario final. Le cinéaste rêve d’un film de science-fiction qui renouerait avec les grands films d’aventures épiques comme Lawrence d’Arabie ou L’Homme qui voulut être Roi. Des films qui réussissaient à combiner portraits intimistes et découverte d’une culture étrangère, le tout dans un cadre on ne peut plus exotique. Sans oublier les indispensables scènes de bataille !

Voir notre article sur Avatar 2

Synopsis : Avatar

Synopsis : Avatar nous entraîne au XXIIème siècle sur les traces de Jake Sully, un ex-marine paraplégique qui se retrouve affecté sur Pandora, une lune en orbite autour d’une planète éloignée. Cette lune regorge d’un minerai rare dont la Terre a désespérément besoin, mais l’air y est irrespirable pour les humains. Les hommes travaillent avec des masques, mais ont aussi eu l’idée de donner naissance à des créatures artificielles, copies conformes des indigènes de Pandora, les Na’vi, avec l’ADN de son « propriétaire » humain. Celui-ci dispose ainsi de son avatar qu’il peut contrôler par la pensée : il voit et sent tout ce que l’avatar voit et sent. Grâce à ces Na’vi artificiels, les hommes peuvent explorer à loisir la planète et tenter de communiquer avec les véritables Na’vi… pour mieux les contrôler. Jake découvre alors les  Na’vi et leur étonnante culture, et va progressivement passer de leur côté grâce à l’amour de la belle Neytiri…

Une histoire classique d’amour et de rédemption sur fonds de bons Indiens et méchants cowboys, similaire à Danse avec les loups, mais dans un cadre à la fois futuriste et (très) exotique : « Le fait que le décor soit fantastique rend l’histoire et les sentiments d’autant plus reconnaissables » explique James Cameron.  Comme le colonel Lawrence dans Lawrence d’Arabie ou John Dunbar dans Danse avec les loups, Jake Sully est une sorte de Candide qui débarque dans un monde inconnu. Il découvre en même temps que le spectateur une réalité différente, et devient dès lors notre guide. Cette astuce scénaristique va permettre à James Cameron de distiller progressivement ses informations sur la culture des Na’vi et sur leur monde.

Trop d’avance sur la technologie

Ce monde, il l’avait déjà couché sur le papier dès 1995, avant même de se lancer dans Titanic. À l’époque, la technologie n’est pas encore en mesure de créer des personnages photoréalistes, surtout pas dans plusieurs centaines de plans. Mais en 2002, James  Cameron découvre Gollum dans Le Seigneur des Anneaux. Pour la première fois, un personnage animé en 3D est aussi réaliste que les acteurs réels. Avatar peut enfin devenir réalité. Et ce sont d’ailleurs les créateurs de Gollum, le studio Weta Digital en Nouvelle-Zélande, qui hériteront du projet, secondés par une dizaine de studios dont ILM, Framestore, et même le français Buf.
Cameron commence par réaliser un test afin de démontrer à la 20th Century Fox que le film est faisable. C’est que le réalisateur veut, difficulté supplémentaire, tourner le film en relief 3D. Il compte utiliser la caméra Fusion qu’il a développée avec le caméraman Vince Pace. Il s’agit en fait de deux caméras Sony HDC-F950 HD accolées, les objectifs étant écartés de 6,25 centimètres, soit l’écartement moyen des yeux humains.
En 2005, le projet démarre – avec un budget colossal, officellement entre $250 et $300 millions, mais la rumeur en cette fin 2009 à Hollywood parle d’un budget plus proche de $500 millions, marketing compris  !

Réinventer l’animation 3D : caméra virtuelle…

Tandis que le monde de Pandora commence à prendre forme, James Cameron se penche sur les défis techniques, inimaginables, que pose le film et insiste sur un point précis : il veut filmer les scènes de Pandora de la même façon que les scènes avec les acteurs réels. Cela exclut donc d’animer les Na’vis en key frame, comme pour les personnages aliens de la seconde trilogie Star Wars, par exemple. Les personnages doivent être interprétés par de vrais acteurs, et leur jeu doit être enregistré en direct. Plus que de la Motion Capture, Cameron veut de la « Emotion Capture »…

James Cameron

James Cameron fait appel à Rob Legato, superviseur des effets visuels de Titanic, pour mettre au point un système de tournage virtuel dans lequel il aurait les mêmes sensations que sur un vrai plateau.  “Le problème avec la 3D, c’est que vous expliquez vos intentions du mieux que vous pouvez, mais qu’ensuite, le plan est réalisé par une équipe de graphistes et vous voyez le résultat des semaines plus tard. Et il faut bien comprendre que ce que vous obtenez alors, c’est une interprétation de ce que vous avez demandé. Résultat, on se retrouve souvent avec des malentendus, des erreurs d’appréciation. C’est très frustrant. J’ai donc cherché un moyen de réduire ces malentendus et de pouvoir décrire – sans ambiguïté possible – tous les détails d’un plan. Le seul moyen était que ce soit Jim qui tienne la caméra…”
Après différents prototypes, cette caméra virtuelle prend la forme d’une sorte de volant au centre duquel se trouve un moniteur de 15 x 10 cm, soit à peu près la même taille que les lecteurs DVD portables. L’écran est entouré de boutons qui permettent de changer les réglages : focale, position du zoom, type de mouvement de caméra (Steadicam, dolly, etc.), hauteur de prise de vues…

Robert Zemeckis et James Cameron

Avec ce système, James Cameron était en mesure d’adapter la prise de vue en fonction de que les acteurs lui offraient, et ceux-ci ajustaient leur jeu en fonction de la présence de la caméra, exactement comme sur un plateau de tournage traditionnel. “La grande différence avec le procédé utilisé par d’autres cinéastes [ndlr – comme Robert Zemeckis], c’est que Jim filme l’action en direct, alors que les autres enregistrent d’abord les acteurs, puis établissent le découpage en postproduction. Du coup, ils n’ont pas la même interaction caméra/acteurs. Le simple fait de tenir la caméra à la main, au lieu de contrôler la prise de vue à l’aide d’une souris, assis devant un moniteur, rend le tournage beaucoup plus intuitif. Sans compter que le processus n’a plus rien à voir avec un tournage traditionnel. Or, c’était là une exigence de Jim : malgré l’importance de la 3D, il voulait continuer de travailler, autant que possible, de la manière qu’il connaissait.”
Le producteur Jon Landau confirme : “La caméra virtuelle a permis à Jim de diriger ses acteurs avec une immédiateté qui était impossible jusqu’ici. Cela a aussi permis aux acteurs de mieux sentir leurs personnages en images de synthèse parce qu’ils pouvaient voir les scènes qu’ils venaient de jouer presque immédiatement, au lieu de devoir attendre plusieurs mois après la fin du tournage que les effets visuels de ces scènes soient terminés.”

… plus performance capture
Les scènes des Na’vis sont enregistrées dans un immense hangar vide de Los Angeles sous la houlette de Giant Studios, spécialiste de la motion capture. 120 caméras vidéo à infrarouge entourent la partie centrale : le plateau de « tournage ». Le décor de la scène est symbolisé par des volumes en mousse que l’équipe peut reconfigurer à volonté pour représenter troncs d’arbre, rochers, etc. Les acteurs portent un justaucorps recouvert de traqueurs réfléchissants. Des logiciels dédiés analysent l’emplacement de ces traqueurs dans chaque image, puis transposent ces données sur le personnage virtuel correspondant à chaque acteur. De la sorte, chaque mouvement du comédien est imité en direct par son avatar virtuel. L’animation est instantanée.
Pour l’animation faciale, l’équipe met au point un système inédit : les acteurs portent un casque sur lequel est fixée en porte-à-faux une microcaméra braquée sur leur visage. Celui-ci est recouvert d’une centaine de points de repère. Les mouvements faciaux sont alors analysés par des algorithmes très élaborés, puis transposés en temps réel sur le visage des Na’vis. James Cameron dispose ainsi de personnages 3D animés en direct de la tête aux pieds. La caméra virtuelle est, elle aussi, « traquée » image par image afin que le logiciel puisse calculer le point de vue sur les acteurs à partir de la position de James Cameron sur le plateau : chaque mouvement de la caméra virtuelle se traduit par le mouvement correspondant sur le moniteur.
Mais la présence seule des personnages ne suffit pas à Cameron, il veut avoir l’intégralité de l’image sur son moniteur. Dans cette perspective, son équipe a modélisé en amont du tournage tous les décors du film en moyenne résolution (type jeu vidéo). Lorsque James Cameron démarre une scène, il importe le décor 3D dans sa caméra virtuelle. Dès lors – et c’est là l’une des grandes innovations d’Avatar – le réalisateur a sous les yeux les acteurs sur le plateau de Motion Capture en train de jouer la scène, et en même temps, l’animation en temps réel des personnages 3D dans le décor. Il peut non seulement visionner le jeu des comédiens dans le contexte du décor, mais aussi cadrer l’action en direct. Comme sur un tournage traditionnel. Il s’agit-là d’un vrai bouleversement du processus d’animation 3D.
D’autant que le réalisateur pouvait continuer à peaufiner son découpage sans limite de temps : “Longtemps après que les acteurs soient tous rentrés chez eux, j’étais encore sur le plateau avec la caméra virtuelle, cherchant à couvrir les meilleurs angles possibles pour chaque scène. Pour cela, il me suffisait de repasser l’enregistrement de chaque prise en modifiant la position de la caméra. Je pouvais même, dans une certaine limite, déplacer les acteurs. Je pouvais aussi changer l’éclairage. Tout était possible…”

117 minutes de VFX

Les plans validés ont été ensuite transmis à Weta Digital avec un seul mot d’ordre : “Voici les scènes terminées, faites en sorte que ça ait l’air réaliste.” Dans les faits, chaque plan a été créé deux fois : une première fois en basse résolution par James Cameron sur le plateau, et une seconde fois par Weta en haute résolution. Cette seconde version demandera à elle seule trois ans de travail à l’équipe de Joe Letteri, superviseur senior des effets visuels. Le défi est colossal : 1400 plans à effets visuels, quasiment tous avec des Na’vis animés en 3D. Le projet est tellement énorme que la totalité du personnel du studio finira par y être affectée, soit 900 personnes !
Weta utilise un pipeline traditionnel : Maya pour la modélisation et l’animation, RenderMan pour le rendu, et Shake pour le compositing. Le logiciel maison de simulation de foule Massive tient aussi un rôle important. “Au lieu de représenter des personnages, comme dans Le Seigneur des Anneaux, les agents de Massive étaient cette fois des plantes et des graines : les graines poussaient sur les branches et devenaient des feuilles, les arbres poussaient et prenaient la place de troncs plus vieux qui mouraient, etc.” explique Eric Saindon, superviseur des effets visuels. “Une véritable simulation de cycle de vie végétal. Massive nous a aussi permis d’animer des milliers d’insectes volants, et de créer les innombrables points luminescents dans les scènes de nuit.”
Pour répondre aux exigences de qualité d’animation de James Cameron, Weta met au point un tout nouveau système musculaire pour la modélisation. Chaque Na’vi dispose d’un authentique réseau de muscles animables, ce qui se traduit par des mouvements bien plus fluides et naturels. Aucune retouche manuelle n’est effectuée sur l’animation faciale ou corporelle des Na’vis : ce que l’on voit à l’écran est bel et bien la transposition intégrale de l’interprétation des acteurs. “Par contre, les oreilles et la queue ont été animées en key frame, puisque c’était impossible à faire en motion capture,” souligne Saindon. “Nous avons également accentué l’ouverture de la bouche des personnages pour aller au-delà de ce que les acteurs pouvaient faire dans la réalité – c’était une exigence de Jim. Dans le même esprit, certaines poses ont été exagérées par rapport à ce qu’un être humain pouvait faire.”

Voir le making OF de Gravity

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